Arrêtez de surprotéger ! Donnez-leurs la permission !

Dans le numéro de l'été 2020 , je vous parle de lâcher-prise ...

Arrêtez de surprotéger ! Donnez-leurs la permission !

Arrêtez de surprotéger ! Donnez-leurs la permission !

 

Un enfant, quand il fait ses propres découvertes, ses premières tentatives, apprend de lui-même à gérer des situations nouvelles. Il prend des risques parfois mais qui à dit que la prise de risques était un vilain défaut ?

Casque pour les premiers pas, genouillères pour éviter les genoux écorchés dans la cour pleine de graviers, barrières un peu partout dans la maison, arrondisseurs de coins de table en silicone...On est paré! La tendance est belle et bien à la surprotection de notre progéniture. Le risque est-il vraiment là? Et si l'on acceptait de lâcher prise? Ma voisine, maman de Théo, 5 ans et de Lucie 11 mois m'avoue faire partie de ces parents prêts à tout pour éviter le moindre petit bobo. Et en même temps elle prend conscience qu'elle en fait peut-être un peu trop ! Avant, dit-elle, on n'en faisait pas tant!
Petite j'ai grandi à la campagne, j'avais les joues rouges et les genoux écorchés. Grimper sur la charrette de paille, se faufiler entre les fils barbelés pour passer d'un champ à l'autre, sauter par dessus les ruisseaux, jouer aux petites voitures pendant des heures dans la cour, en culottes courtes, avec mes trois frères, on a appris à bouger, à se débrouiller, à être créatif et à trouver les meilleures solutions.

Jouer sans être surprotégé

Les enfants à qui on permet de jouer dehors sans surveillance, seuls ou entre amis, dépensent plus d’énergie que ceux qui sont surprotégés par leurs parents. C’est du moins ce qu’est venue confirmer une étude menée par un chercheur de l’université de Toronto.
« La protection d'un enfant devient abusive quand elle entrave son développement », définit Stéphane Clerget, pédopsychiatre. Chaque parent doit apprendre à protéger son enfant contre les dangers de son environnement, mais il est important de le faire sans le surprotéger. Garder un enfant sous cloche s'avère beaucoup plus dangereux que d'oser le laisser s'aventurer. Le surprotéger maintient un état de dépendance et nuit à son estime personnelle.

Différence entre risque et danger

L’évitement des risques peut priver les enfants de développer des compétences qui les aideraient à gérer des situations qu'ils rencontreront plus tard dans la vie. Un enfant, quand il fait ses propres découvertes, ses premières tentatives, apprend de lui-même à gérer des situations nouvelles. Il prend des risques parfois mais qui à dit que la prise de risques était un vilain défaut ? On apprend à tous les âges de la vie...

Un risque, c’est avant tout un défi que l’enfant décide de relever ou non.

Le danger n'est pas forcément présent. Il peut y avoir des avantages comme des inconvénients ou des controverses à prendre un risque mais comme le dit la citation "le plus grand risque à prendre est de ne prendre aucun risque". Confronté à un risque, l'enfant va devoir mettre en route des mécanismes intellectuels qui vont lui permettre d'agir en conséquence pour parvenir à ses fins. Relever des défis pour un enfant représente l’un des plus puissants moteurs incitant à se mettre en action. C'est le côté aventureux qui motive à tenter une expérience jamais réalisée auparavant. Tant qu'il ne l'aura pas fait, ou pire, si on lui interdit d'agir, il lui sera difficile d'acquérir des règles de conduite et des réflexes. Plus grand, le risque lui permet d'échanger avec vous, de débattre collectivement des pratiques avec d'autres enfants, des positionnements, des enjeux, etc. Les jeux dits 'à risques' pourraient d'ailleurs être baptisés de 'jeux aventureux' puisqu'ils suscitent l'intérêt de la découverte en partant à l'aventure, et le terme est plus sympathique.

Un danger, c'est une menace réelle.

Par exemple, je marche dans la rue et je ne vois pas la voiture qui arrive à vive allure. Pour un adulte, il s'agit de s'assurer que le danger est hors de portée de l'enfant. Lorsque l'on parle de 'jeu à risques' il n'y a pas vraiment un danger, et si il y en avait un, il a été écarté avant de jouer. Pour exemple, sauter à pieds joints par dessus un ruisseau, c'est un jeu aventureux pour un enfant ! Mais traverser une rivière avec du courant, ça, c'est un acte dangereux !
Il est nécessaire n'accepter que votre tout-petit s'égratigne les genoux ou qu'il se salisse, c'est ce qui lui permet de grandir et de mieux appréhender son environnement. Comme disait mon grand-père quand il nous voyait pleurer après s'être fait mal : "c'est le métier qui rentre!".
Selon Germain Duclos, psychoéducateur, orthopédagogue et conférencier de renom, le fait de surprotéger l'enfant ou de faire les choses à sa place ne favorise pas son développement. Cela le maintient plutôt dans un état de dépendance. Cette attitude surprotectrice nuit à l'estime de soi de l'enfant, qui y voit la confirmation de son incapacité à faire les choses lui-même.

 

Petit tour d'horizon d'attitudes surprotectrices

  • Accourir dès les premiers pleurs de votre enfant
  • Interdire de grimper ou d'explorer
  • Mettre tout sous verrou
  • L'habiller en " tout neuf" et lui dire "non, tu vas te salir !"
  • Dire "attention" ou "je vais le faire à ta place, tu n'es pas capable"
  • Répondre aux besoins de votre enfant avant qu'il ait eu le temps de s'exprimer
  • Refuser les invitations à aller chez les copains où dans la famille
  • etc

 

Lâchez prise... et apprivoisez vos peurs, faites confiance aux enfants : les enfants font naturellement demi-tour quand ils se trouvent devant un défi qu’ils ne peuvent pas relever. Des études québécoises démontrent que les enfants s’engagent rarement dans des actions qu’ils ne sont pas certains de réussir. De manière instinctive, ils agissent dans les limites de leurs capacités.
Alors donnez-leur la permission !



Marina Lemarié pour STRADA numéro 49 : lire la publication